Marketing et durabilité : la transparence à l’épreuve du greenwashing

Alors même que la crise écologique se concrétise chaque jour davantage, consommateurs, salariés, acteurs économiques comme pouvoirs publics attendent des entreprises qu’elles prennent une part active aux défis planétaires.

Dans ce contexte les pratiques de greenwashing, ou « éco-blanchiment », se sont développées sous forme de falsifications, d’omissions ou encore de mensonges pouvant fortement écorner l’image des organisations concernées. La multiplication de telles pratiques a créé une méfiance généralisée sur toute communication touchant au sujet. Dès lors, comment pousser les professionnels à intégrer cette nouvelle réalité : la durabilité n’est pas un sujet marketing comme un autre ?

Dans le cadre de son ambitieux Green Deal, l’Union européenne a pris la décision en 2019 de faire reposer une grande part de la transition écologique sur les choix – nécessairement éclairés – des acteurs économiques vers des solutions vertes. La transparence des entreprises sur les sujets de durabilité devient un élément clé de la bascule écologique, faisant ainsi écho à la forte attente des consommateurs en la matière. Ce sont ainsi 73 % des Français qui se déclarent prêts à privilégier, pour leurs achats, des marques mettant en avant de bons chiffres en termes d’impact environnemental[1]. Une tendance qui ne cesse de s’accentuer : 59 % des consommateurs français estiment que le développement durable est plus important pour eux qu’il y a deux ans[2].

Des attentes qui sont également celles des professionnels : selon une étude de Kantar publiée au printemps 2023, 75 % des actifs pourraient fonder leur choix d’une entreprise sur le critère RSE[3].

Pour autant, le sujet se révèle périlleux. A tort ou à raison, beaucoup associent désormais les sujets de durabilité au greenwashing. Le principe de cette pratique marketing ? Utiliser l’argument écologique de manière erronée, volontairement ou non,  afin d’améliorer son image. En 2020, une étude de la Commission européenne a même conclu que « 53,3 % des allégations environnementales examinées dans l’UE étaient vagues, trompeuses ou infondées et que 40 % n’étaient pas étayées »[4]. D’après une étude de Goodvest, 75 % des consommateurs serait désormais méfiants face aux promesses écologiques des entreprises[5].

Bad buzz et encadrement réglementaire

Pour les entreprises dont les pratiques de greenwashing ont été mises à jour, le risque est d’abord réputationnel. Total Energies, Coca-Cola, McDonalds, Burger King, Volkswagen, H&M, Celio : chacune  de ces enseignes a connu récemment, sur les réseaux sociaux et dans la presse, de fortes retombées négatives suite à des campagnes marketing jugées excessivement « vertes ».

Prenant acte de la multiplication de ces mauvaises pratiques, les pouvoirs publics semblent décidés à encadrer ce que l’on appelle les « allégations environnementales ». La France s’affirme en précurseur en la matière. Depuis le 1er janvier 2023, un décret, pris dans le cadre de la loi ‘Climat et Résilience’ (2021), encadre de manière plus sévère les différentes allégations autour de l’expression « neutralité carbone » et les formulations équivalentes. L’usage du terme est désormais lié à la capacité de prouver la sincérité de celui-ci. En cas d’infraction, les entreprises risquent une amende pouvant aller jusqu’à 100 000 euros. L’encadrement devrait prochainement être européen : à la suite de la France, les instances européennes discutent actuellement d’une directive « Green Claims » qui interdirait différentes pratiques de greenwashing.

En France, au-delà de ce cadre législatif, l’Agence de la transition écologique (ADEME), mais aussi l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) sont actives depuis plusieurs années pour lutter contre cette pratique. Recommandations pour éviter toute communication trompeuse, ateliers de formation, conseils pour s’assurer que les recommandations sont respectées, interventions pour mettre un terme à la diffusion d’une publicité non conforme… les professionnels ont de nombreux outils à leur disposition pour éviter des pratiques trompeuses.  L’ADEME liste ainsi plusieurs comportements à éviter[6] :  la valorisation de comportements contraires à la transition, une allégation environnementale manquant de précision, une promesse mensongère ou disproportionnée, ou encore des éléments visuels ou sonores trompeurs.

Face à la multiplication des risques d’accusation de greenwashing, une nouvelle tendance voit le jour : le « greenhushing »  ou « mutisme vert ». La pratique consiste pour une entreprise à préférer ne pas communiquer publiquement ses pratiques et impacts environnementaux – alors même qu’elle est active – par crainte que ses manquements soient montrés du doigt. Une pratique compréhensiblequi peut conduire à ne pas satisfaire les attentes de ses parties prenantes en matière de transparence. En outre, renoncer à communiquer, c’est oublier que les particuliers comme les professionnels concernés ont, pour grande partie, conscience de l’ampleur du défi que constitue la transformation durable. Ils apprécient d’autant plus de disposer d’une information précise sur le chemin parcouru, comme celui à parcourir.

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