L’Intelligence Emotionnelle

L’Intelligence Emotionnelle

Nathalie Paldacci, Consultante Sénior Luxury Attitude

L’industriel américain Henry Ford déclarait il y a bien longtemps : « les deux choses les plus importantes n’apparaissent pas au bilan de l’entreprise : sa réputation et ses Hommes ».

Cette déclaration est toujours d’actualité, sinon plus encore, un siècle plus tard. En effet, nous entendons parler de plus en plus de l’importance de l’humain dans la relation client et ce surtout depuis qu’Internet s’est développé donnant le choix aux clients d’acheter soit en ligne soit en boutique.

Depuis quelques années déjà, la digitalisation et la robotisation placent l’humain, occupant certains postes, au second rang et ce pour répondre à des exigences très hautes de la part des clients ; ces exigences se portent sur la partie fonctionnelle de l’expérience, partie qui inclut entre autres la fluidité des process ; vivre une expérience sans couture est devenue incontournable.

Mais, selon de nombreuses études, notamment conduites dans le champ des neurosciences, nos prises de décisions sont à 90% subconscientes. Notre prise de décision dite rationnelle est donc réduite à ….10% ! Le versant fonctionnel de l’expérience étant vécu comme un préalable à la poursuite de l’expérience avec une marque, il est donc vital de déployer le versant émotionnel de cette même expérience afin de créer ce qu’on nomme plus communément le « wow effect ».

Cela explique sans doute le nombre important de littératures sur les « Soft Skills » et sur l’Intelligence Emotionnelle qui marquent les esprits des clients et créent plusieurs formes de fidélité profitables aux entreprises. La fidélité conduisant à revenir au sein de la même marque et à acheter à nouveau et celle qui conduit à recommander ; en cela, le nouveau consommateur a un pouvoir énorme sur les marques en postant des avis positifs ou négatifs sur les réseaux sociaux.

Les soft skills sont définies comme un ensemble de bonnes manières telles que ponctualité, adaptabilité, flexibilité, esprit d’équipe, ténacité et sont devenues des critères de recrutement pour les entreprises qui recherchent des collaborateurs et/ou managers soit sur des postes en contact avec le public soit  sur des postes qui vont s’inscrire dans la transition vers une entreprise orientée clients ; aujourd’hui, les étudiants en quête de stage, les personnes en phase de recherche d’un nouvel emploi sont priés d’intégrer cette donnée et de mettre en avant leurs propres différences et ce qui les a construit tout au long de leurs vies personnelle et professionnelle.

Au delà des compétences nées du savoir-faire et de l’expérience, le savoir-être et le savoir-vivre sont des atouts indéniables qui feront la différence face aux clients, notamment dans la prise de décision d’achat et de son canal de distribution : achat en boutique grâce au Conseiller de vente ou achat en ligne, simple, rapide et surtout sans les irritants de la relation marque-clients que sont notamment les conseillers arrogants, quasi mutiques au discours robotique et bien formatés par les centres de formations en interne.


Et le sourire ? Un proverbe chinois dit « Sourire trois fois tous les jours rend inutile tout médicament ».

Cela dit, les bienfaits du « vrai sourire sincère » sont nombreux et parmi ses bienfaits, nous pouvons entre autre libérer des endorphines, l’hormone du plaisir ! Un client ainsi chaleureusement accueilli sera dans de meilleures dispositions de par les messages positifs envoyés par ce sourire… Les neurones miroirs de notre cerveau vont générer une certaine réciprocité de la part de celui qui reçoit le sourire : le sourire est contagieux.

Une étude sur les conséquences du sourire sur le comportement des clients a été réalisée aux États-Unis il y a plusieurs années et a révélé que le serveur au sourire sincère recevait plus de pourboires de ses clients que le serveur qui ne souriait pas.


Ceci étant dit et acquis par la plupart des entreprises, qu’en est-il de l’intelligence émotionnelle ?

En 1983, Howard Gardner publie « Frames of Mind » : The Theory of Multiple Intelligences a introduit le fait que les diverses types d’intelligence traditionnels, tels que le QI, ne suffisent pas à expliquer complètement la capacité cognitive.

Il a initié l’idée d’intelligences multiples qui incluaient à la fois l’intelligence interpersonnelle (la capacité de comprendre les intentions, les motivations et les désirs d’autrui) et l’intelligence intrapersonnelle (la capacité de se comprendre soi-même, d’apprécier ses sentiments, ses craintes et ses motivations) -(source Wikipédia).

Selon les psychologues Peter Salovey et John D. Mayer, l’Intelligence Emotionnelle fait référence à la capacité de reconnaître, comprendre et maîtriser ses propres émotions et à composer avec les émotions des autres personnes. Elle est proche du concept d’intelligence sociale. Le concept a été popularisé par Daniel Goleman en 1995.

Le modèle de Goleman séquence l’Intelligence Emotionnelle comme suit :

  • La conscience de soi, la reconnaissance de ses propres émotions et les utiliser de manière à optimiser nos décisions 
  • La gestion et la maîtrise de nos émotions de manière à orienter la relation dans le sens que l’on veut
  • L’intelligence interpersonnelle qui consiste à reconnaitre les émotions d’autrui et à réagir en conséquence
  • La gestion des relations consiste à réagir et à développer la relation interpersonnelle tout en maîtrisant les conflits

Depuis peu, nous ajoutons à cette liste l’empathie. Lors de formations ou de séances de coaching, des participants opposent toujours l’objection suivante :

   « Ah, mais il s’agit de quelque chose que l’on possède à la naissance ou pas, aucune formation ne servira à rien ! »

Ce fameux débat entre l’inné et l’acquis dédouanerait donc ceux qui en sont dépourvus de faire les efforts nécessaires pour acquérir cette Intelligence Emotionnelle nécessaire au bon fonctionnement des relations en entreprise, que ce soit avec ses collègues, collaborateurs ou subordonnés qu’avec les clients et prestataires.

Daniel Goleman affirme que ces compétences émotionnelles ne sont pas de l’ordre de l’inné mais bien de celui de l’acquis qui se développent et se perfectionnent tout au long de la vie.

Il est donc crucial pour les entreprises d’orienter les formations de leurs personnels autour de ces compétences émotionnelles et relationnelles de façon à développer l’efficacité et la productivité. De nombreuses entreprises ont compris cela et ont mis en place de nouveaux postes pour répondre à ce besoin croissant d’émotions positives nées de relations saines et maîtrisées…Ainsi des Office Happiness Managers et leurs lots de gadgets tels que babyfoot ou autre ont fait florès.


Mais tant que les discours principaux des managers seront orientés chiffres et résultats quantitatifs, l’IE ne sera qu’un plâtre sur une jambe de bois.

Comment être en empathie avec son client quand les objectifs de vente restent la priorité ? Comment construire cette relation basée sur la confiance avec un client quand son manager passe 90% du temps dédié au briefing à parler chiffres, marge…? Comment rester bienveillant avec ses clients quand le manager ne l’est pas vis-à-vis du collaborateur ? …

Richard Branson l’a dit : « Traiter vos collaborateurs comme vous voulez que vos clients soient traités ! » 

Cette fameuse congruence entre le faire et le dire, le faire-faire prend là tout son sens… Après avoir modifié les critères de recrutement des collaborateurs en première ligne avec les clients, il est temps de modifier les critères de recrutement des managers, notamment ceux occupant les postes dits de « middle management » car ils sont la clé de voûte du management de proximité et du bien-être au travail, source de motivation et de productivité accrue.

Tant que les managers resteront sur le management du quoi (procédures..), l’Intelligence Emotionnelle restera portion congrue. Il est temps de passer au management du Comment en intégrant les avis des clients afin de transformer plaintes en opportunités d’évolution.


Simple… et très compliquée, question d’état d’esprit…

En l’espace de 3 semaines, j’ai pu tester, en tant que cliente, deux agences de location de voitures situées dans la zone d‘un même aéroport.

1ère agence : Sur le comptoir était posé un écriteau indiquant « insultes = sortie » … Cela donne une idée assez claire de l’état d’esprit de l’équipe sous la houlette d’un management en ligne avec des procédures certainement rigides ! Cette absence de souplesse conduit de plus en plus les clients à se plaindre, surtout en ces temps de crise sanitaire. Ici l’Intelligence Emotionnelle consiste à faire sortir de l’agence les clients considérés comme virulents.

Mais un client n’est jamais virulent sans raison, quelle qu’elle soit ; ici, la seule issue à toute problématique est la porte.

En conséquence ou en prévision de tout conflit éventuel, l’équipe de ette agence développe un ensemble d’attitudes en ligne avec cet écriteau, attitudes basées sur l’arrogance, le mépris et l’absence totale d’empathie, sans parler de l’absence totale de sourire…. Ou bien le panneau est-il né de la conséquence des attitudes de l’équipe ?

2ème agence : Un écriteau est posé aussi sur le comptoir mais son contenu diffère : « votre ressenti nous importe et aidez-nous à améliorer notre service en remplissant le questionnaire placé sur le comptoir »… Quelles attitudes l’équipe développe-t-elle à votre avis au sein de cette agence de location ? J’ai eu en face de moi, une équipe souriante, aimable et qui savait sortir de ses process par quelques questions sur moi, pour s’intéresser à moi, la client, l’humain…


Quand je forme les équipes travaillant dans les secteurs de l’hôtellerie ou du Retail, une autre objection que l’on m’oppose en formation par de nombreuses personnes est :

« Ah mais cela prend du temps ! »

Le sourire prend-il autant de temps à afficher sur son visage que son absence ? Il s’agit là aussi de sortir de sa routine et de considérer le client comme un don et non comme une « corvée » qui contribue à la profitabilité des marques et aux salaires perçus chaque mois par chacun travaillant au sein de l’entreprise.

Tout dépend du cercle dans lequel le manager veut entrer : cercle vertueux ou cercle vicieux ?

Mais avant de jeter l’opprobre sur les managers de proximité, il serait intéressant de s’attarder sur la vision de l’entreprise, de ses valeurs car ce sont les lignes directrices qui marquent ainsi la façon de travailler et de considérer les clients. Et à ce niveau, nous parlons de direction générale, de vision globale.

l’Intelligence Emotionnelle devrait donc être pratiquée à tous les étages de la pyramide hiérarchique, la congruence managériale servirait d’exemple et le chiffre d’affaires serait une conséquence et non un but à atteindre…

Peut-être ce rêve se réalisera-t-il dans le « monde nouveau de l’après-Covid » … Et vous qu’en pensez-vous ?

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